mercredi 27 avril 2011

Je, François Villon - Jean Teulé

Jean Teulé (né en 1953) est l'auteur d'une dizaine de romans, parmi lesquels on peut citer Je, François Villon, publié pour la première fois en 2006. L'auteur a engagé un pari risqué en écrivant à la première personne cette histoire très romancée. S'il est certain que François Villon ait été un grand poète, il faut avouer que nous ne connaissons pas grand chose finalement de lui. Les seules sources dont nous disposons aujourd'hui sont l'oeuvre littéraire très autobiographique et une poignée de documents administratifs relatifs à ses procès. Ce "mauvais garçon" du XVème siècle, chanté par Georges Brassens (1921-1981), ce personnage singulier, à la vie tumultueuse, cette force de caractère, a bouleversé indéniablement son époque.


Pocket, 435 pages
François de Montcorbier naît en 1431 à Paris, dans une période agitée, en proie aux épidémies et à la famine ; la ville est occupée par les Anglais et Jeanne d'Arc meurt la même année, brûlée sur le bûcher. L'avenir du nouveau-né s'annonce bien sombre : son père, condamné pour un menu vol, meurt sur la potence. Six ans plus tard, sa mère est injustement arrêtée, à la suite d'un malentendu et est suppliciée à son tour, sur ordre de Thibault d'Aussigny. A six ans, le petit François est orphelin et est recueilli par Maître Guillaume de Villon, dont il prendra le nom, un chapelain de l'église Saint Benoit de Bétourné situé dans le quartier des universitaires. Le religieux prend soin de lui, l'élève, l'instruit et, en bon tuteur, l'encourage fortement à faire des études dans le but d'en faire un clerc. François reçoit la tonsure, porte la bure et étudie le latin et le grec à l'Université de Paris mais il s'ennuie. Il est surtout doué pour faire l'école buissonnière. Il s'éprend d'une jeune femme de bonne famille, prénommée Isabelle, tout en passant son temps à courir les filles ; il se livre à des blagues de potache, déclame ses premières ballades truculentes et humoristiques auprès de ses amis étudiants, se trouve mêlé à diverses rixes, vole les princes, traîne dans les tavernes les plus sordides, fréquente des prostituées ; bref, François Villon mène une vie de débauche. Sa vie bascule lorsqu'il croise une bande de dangereux et cruels brigands, les "coquillards". Le jeune homme est prêt à tout pour intégrer le groupe...


Mon avis : en retraçant la vie de François Villon, Teulé nous plonge dans un monde sordide où règnent la misère, la cruauté, les viols et vices, bien loin de la poésie, où la dignité humaine n'avait aucune valeur. Aucune morale n'était permise. Il n'était pas simple de vivre en ces temps très anciens, la justice y était expéditive et approximative, aux châtiments totalement disproportionnés.

Jean Teulé s'est formidablement documenté pour restituer non seulement le personnage mais surtout la rudesse d'une époque, celle d'un système féodal moribond. Le texte est émaillé de poèmes et d'anecdotes qui sont rattachés à la personne singulière de Villon et l'on saisit pourquoi ce poète maudit de l'extrême utilise la poésie comme une arme pour mieux se faire entendre dans un contexte moyenâgeux si violent.

Malgré certaines scènes très glauques, l'histoire se lit avec une facilité déconcertante, il n'y a pas de temps mort, les chapitres sont courts, le rythme est vif, la plume envoûtante. Le lecteur assiste à la déchéance volontaire de Villon.

On pourra toujours s'interroger sur le réel degré de vérité historique et biographique et y voir une vision partisane de sa vie dissolue et presque sans humanité. De nombreuses questions demeurent mais l'auteur choisit de ne pas y répondre, s'attachant à l'aspect mythique du poète.

Entre effroi et dégoût, on reste pourtant fasciné par ce personnage instable et bouillonnant de vie.


Le poète a vécu trente-deux années intenses. En 1463, après une énième incartade, il est banni de Paris. Il n'existe plus aucune trace de lui. Sa disparition énigmatique a contribué à sa légende.

Pour tous ceux qui ont étudié ses poèmes à l'école, c'est un personnage que je vous invite à (re-)découvrir.


vendredi 15 avril 2011

Vidocq - Michel Peyramaure

Michel Peyramaure, né à Brive, en Corrèze, en 1922, est l'auteur de nombreux romans d'aventure, la plupart baignée dans l'histoire de France. Nombre d'entre eux ont d'ailleurs fait l'objet de traductions. En 1979, il reçoit le Grand Prix de la Société des gens de Lettres pour l'ensemble de son oeuvre.

Parmi ses romans, l'on peut distinguer notamment une série de portraits intitulée Les trois bandits, trilogie consacrée aux brigands célèbres : Cartouche, Mandrin et Vidocq (publiés entre 2006 et 2007). C'est le dernier tome que je vais vous présenter aujourd'hui.


Robert Laffont, 378 pages
Rares sont les destins aussi extraordinaires que celui d'Eugène-François Vidocq. Ce personnage hors du commun, tant par son physique que par sa vie aventureuse, à qui l'on reprochera toute sa vie d'avoir été un bagnard, a aussi bien inspiré de célèbres écrivains tels Victor Hugo ou Honoré de Balzac, qu'alimenté le cinéma et la télévision. François Vidocq est né le 23 juillet 1775 à Arras, dans le Pas-de-Calais. Fils de Nicolas Vidocq, maître boulanger et d'Henriette Dion, il n'est pas prêt à reprendre le travail harassant de son père ; échappant à son autorité et en compagnie de son frère Ghislain, il entre de bonne heure dans la petite délinquance, avec une surprenante précocité et des dons incontestables. Adolescent batailleur, il débute par quelques larcins dans la maison paternelle, lesquels grossissent très vite jusqu'au détournement osé de deux mille francs à son père. Il s'enfuit du domicile familial. Pour échapper à la police, il s'engage dans l'armée révolutionnaire avant de déserter. Voleur et escroc, il est condamné aux travaux forcés à l'âge de 22 ans. Conduit au bagne de Brest, il s'évade avant d'être à nouveau arrêté en 1799 et conduit au bagne de Toulon, d'où il réussit une énième évasion qui lui vaudra cette fois la notoriété et le respect du milieu. Il décide de s'implanter à Paris mais la vie lui est très difficile ; acculé, il prend le parti d'aller offrir son concours à la police parisienne, sous la seule condition de finir sa peine dans la maison de force qu'on voudrait lui désigner. Indicateur au départ, il devient un collaborateur si efficace que le préfet le nomme en 1810 à la tête d'une nouvelle brigade de sûreté, composée exclusivement de condamnés libérés, soucieux de se racheter une nouvelle conduite. Cette entreprise très controversée consistera à infiltrer les crapules afin de mieux les cerner et déjouer leurs méfaits. Vidocq saura sans difficulté se complaire dans la ruse et dans l'art d'astucieux déguisements. Cette méthode innovante se révélera prometteuse et pleine de succès, pour quelques temps...


Mon avis : écrivain et historien de qualité, Michel Peyramaure est avant tout un formidable conteur qui parvient à faire transporter le lecteur dans sa propre imagination. Le roman restitue pleinement le personnage dans son histoire réelle.

Outre la vie incroyable de Vidocq, le roman est un témoignage fort intéressant sur la police et les moeurs criminels du XIXe siècle.

François Vidocq est digne d'un personnage de roman. Jeune homme à tendance impulsive, il est surtout épris de liberté, il aime les femmes et les duels. Il tombera entre les mains de la justice pour des petits délits qui vont cependant entacher durablement sa réputation. Ses ennemis sont partout : dans la pègre mais aussi au sein du pouvoir. Cela ne l'empêche pas d'être enthousiaste des nouveaux gouvernements, qu'il s'agisse du Consulat, de la Restauration ou de la Deuxième République (1848-1852). Il sera néanmoins très critique envers le régime du Second Empire et Napoléon III.

François Vidocq meurt en 1857, âgé de quatre-vingt-deux ans. Escroc, forçat puis infiltré, il
bouleversera, avec un talent certain, la brigade de Sûreté de Paris avant de se mettre à son propre compte en créant en 1833 la première agence française de détectives privés.

Ne souhaitant pas vous en dévoiler davantage, je vous recommande cette très belle découverte littéraire et biographique.

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