jeudi 29 avril 2010

La Chatte - Colette

Dans ma vie de lecteur, j'ai lu très peu de romans de Colette, de son vrai nom Sidonie Gabrielle Colette (1873-1954) ; tout au plus je me souviens vaguement de la lecture obligatoire la maison de Claudine, au collège. C'est un auteur qui ne m'a pas particulièrement marqué ou peut-être est-ce simplement la faute de l'enseignante du moment qui n'est pas parvenue à me donner cette envie de savourer pleinement toute la subtilité de l'écrivain. Quoi qu'il en soit, désireux d'en connaître davantage, je me suis penché récemment sur l'un des romans de Colette, La Chatte, qui fait aujourd'hui l'objet de mon billet.

Je ne vous cache pas que ce titre m'a quelque peu interpellé. Qu'est-ce que l'auteur pouvait bien écrire au sujet de cet animal ? S'agissait-il d'un livre racontant la vie des nombreux chats qui entouraient l'écrivain ? Car je n'ignorais pas son amour profond et sincère pour ce fascinant félin...

Paru en feuilleton dans Marianne du 12 avril au 7 juin 1933, publié chez Grasset dans la collection 'Pour mon plaisir" dès le 12 juin 1933, La Chatte vient à un moment où l'écrivain semble avoir trouvé dans son existence quotidienne une certaine stabilité.


Livre de poche, 159 pages
Enfants choyés et gâtés issus de milieux bourgeois, Alain épouse Camille qu'il connaît depuis plusieurs années. Personnage égoïste, le jeune homme n'est pas facile à vivre. Il réagit comme un enfant capricieux, à l'aise dans cet univers doré et, n'aime pas par dessus tout qu'on lui change ses petites habitudes. Camille, son épouse, est une femme démonstrative, au regard pétillant. En attendant que son appartement de jeune marié soit terminé, Alain est contraint de laisser à ses parents sa chatte des Chartreux, prénommée Saha, qu'il aime profondément. L'amour que ressent le jeune homme pour Saha est indéfectible ; il va bien au-delà de l'affection apportée à un simple animal de compagnie à tel point qu'il provoquera la ruine de son récent mariage avec Camille. Le couple sera mise à rude épreuve lorsque l'animal s'installe finalement dans le foyer conjugal. Camille devient rapidement jalouse de la chatte, et est prête à tout pour se débarrasser de cette rivale redoutable...

Mon avis : il s'agit d'un roman tout en nuances et en fines observations dans lequel la chatte Saha joue incontestablement le premier rôle. Colette, l'amie des chats, connaît manifestement son sujet ; elle dépeint, avec un certain talent, un étrange et improbable "ménage à trois" et a su décrire le comportement et la psychologie de chacun des protagonistes. Alain voit en Saha l'animal le plus parfait qui soit, sa chimère, il la préfère car elle lui semble plus élégante, plus belle et plus gracieuse que Camille. Alain demeure fidèle à sa chatte.

Le roman se lit aisément mais il ne s'y passe pas grand chose, il s'agit somme toute d'une histoire de jalousie absurde et une chatte qui agit étrangement comme un être humain...

Malgré de belles descriptions, notamment celles du jardin et de la nature, et cette belle plume stylée, je n'ai pas été très convaincu par cette lecture ; les personnages sont méprisables. Quant à Saha, je ne m'y suis guère attaché. Il reste que le chat est bien un animal intelligent. Et certains lecteurs considèreront peut-être ce roman comme un hommage aux chats... Soit !

samedi 17 avril 2010

La Maison assassinée - Pierre Magnan

Les cinéphiles se souviennent sans doute du film La Maison assassinée réalisée par Georges Lautner, en 1988, avec entre autres pour interprète le jeune Patrick Bruel. Rares sont ceux en revanche qui se rappellent que ce long métrage n'est en fait l'adaptation du plus célèbre des romans écrits par un grand auteur français : Pierre Magnan.

Ecrivain discret, Pierre Magnan est né en 1922 à Manosque (Alpes-de-haute-Provence) ; il puise l'inspiration de son oeuvre au travers de sa belle Provence. C'est assez tardivement qu'il s'adonne véritablement à l'écriture. En 1976, il publie son premier roman policier avec le Sang des Atrides et nous présente son personnage récurrent : le commissaire Laviolette.

En 1984, il écrit son fameux roman la Maison assassinée, qui s'est vu attribuer à sa sortie le Prix RTL Grand Public, récompense méritée pour un écrivain hors pair. A cette occasion, j'ai relu ce magnifique livre et vous le présente brièvement.

Denoël, 304 pages

A la fin du XIXe siècle, dans un village des Alpes de Haute-Provence, par une nuit d'orage, toute la famille Monge est sauvagement massacrée à l'arme blanche. Seul un nourrisson, âgé seulement de trois semaines est épargné miraculeusement. Il disparaît et est élevé loin du village. Vingt-cinq années passent, le bébé a grandi, il se nomme Séraphin et c'est un jeune homme au passé bien mystérieux. Cette force de la nature qui a connu les souffrances de la guerre, l'enfer des tranchées, lui le rescapé de la Grande Guerre, revient dans son village natal. Séraphin sait qu'il n'a pas de parents. Il apprend d'un vieil habitant du village que sa famille a été massacrée et que trois malheureux journaliers, étrangers ont été accusés du meurtre, jugés et guillotinés. Dès lors tout bascule pour ce robuste survivant. Hanté par ce souvenir, par l'image de sa mère morte égorgée, Séraphin ne cesse alors de remuer le passé. Il entreprend d'abord de détruire la maison du cauchemar dans laquelle il est né avant de mener l'enquête dans le village à la recherche des vrais assassins...

Mon avis : Pierre Magnan écrit là un remarquable roman noir et froid dont l'intrigue policière confine à la tragédie. Mais la force du livre n'est pas tant cette intrigue, passionnante au demeurant, mais plutôt l'ambiance glauque qui s'en dégage, quelque chose de terriblement prenant et réaliste, très souvent dérangeant et cruel dans cette vie rurale, dans ce village au quotidien accablant au sortir de la Première Guerre mondiale.

Les décors sont décrits avec talent, le cadre de vie est rude, les personnages sont forts, criants de vérité, tels Didon Sépulcre, propriétaire d'un moulin à l'huile ou Célestat Dormeur le boulanger ; les femmes ne manquent pas non plus d'éclat, le tout baigné dans un style précis, jamais fastidieux.

En somme, Pierre Magnan sait manier avec brio tous les ingrédients qui lui permettent de tenir le lecteur en haleine jusqu'à la dernière page du roman. Et cette tension permanente est telle que le lecteur frémit.

Il s'agit assurément d'un récit dense, d'une intensité prodigieuse, à déconseiller aux âmes sensibles...


lundi 5 avril 2010

Magasin général, Marie - Loisel et Tripp

En décembre dernier, mon frère m'avait suggéré la lecture de la bande dessinée Magasin général. C'est chose faite aujourd'hui ; cela a été pour moi une agréable découverte.

Magasin général est une série dessinée à deux mains, sur le Québec rural des années 1920, fruit d'une étrange mais belle collaboration entre Régis Loisel et Jean Louis Tripp. La série compte cinq tomes à ce jour.

En préface du premier album (quatre-vingts pages), les auteurs talentueux nous présentent brièvement leur complémentarité et leur cheminement à propos de l'élaboration d'une planche : Loisel s'attaquant aux cadrages, réalisant les premiers croquis, Tripp travaillant et finalisant la lumière, le tout au service d'une belle histoire qui n'a pas encore tout dévoilée.

Casterman, 80 pages
Nous sommes au printemps. Dans la petite bourgade de la paroisse de Notre-Dame-des-Lacs, au fin fond de la campagne québécoise, Félix Ducharme, gérant du fameux magasin général, vient de mourir. Le magasin général est le centre névralgique de cette charmante petite communauté où chacun peut se procurer le moindre outillage, faire ses emplettes, entamer la conversation et connaître les derniers potins du village... Marie, la jolie et jeune veuve, est effondrée. Son chagrin se trouve rapidement submergé par le quotidien, sous la pression des habitants. Elle se demande si elle va pouvoir continuer à tenir seule "la boutique". Autour d'elle, nous allons rapidement faire la connaissance des habitants du village...

Mon avis : de par sa couverture somptueuse, ce magasin général québécois attire l'oeil forcément. Cette bande dessinée est à déguster. Le résultat est très attrayant, le dessin raffiné et l'ambiance dépaysante et sympathique pour découvrir un environnement particulier : la vie au Québec dans les années 1920.

Afin de bien s'y retrouver, le lecteur prendra plaisir à découvrir, en première et dernière page, un plan du village avec les maisons de chacun des personnages de l'histoire. Les auteurs nous proposent une galerie intéressante de personnages très diversifiés, à forte consistance : les trois vieilles bigotes faiseuses de morale, l'institutrice, l'aveugle vagabond, les frères Latulipe, le vieil ermite bourru, le nouveau curé moderne qui vient bousculer les habitudes des villageois, s'évertuant à ramener ses ouailles à l'Eglise tout en s'acoquinant avec le plus réfractaire des villageois, Gaëtan le fils du maire, simplet mais très serviable, sous oublier les bûcherons en chemises canadiennes...

S'il ne se passe pas vraiment grand chose, "en apparence", dans cette histoire, des éléments nouveaux attirent pourtant notre attention, entretenant ainsi un certain suspense, et l'envie de découvrir la suite.

Vous l'aurez donc compris, cet album a tout pour plaire, le lecteur se laisse bercer par cette belle histoire attendrissante, rythmée par de succulents dialogues ; l'on peut d'ailleurs remercier Jimmy Beaulieu qui a su retranscrire les dialogues en québécois, les rendant assurément très agréables pour tout lecteur francophone.

Bref, un magnifique récit, authentique, riche en émotions et plein de tendresse...

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